De la mi-décembre 1917 à la mi-janvier 1918,
Les hivers se suivent et se ressemblent puisque le froid fait de nouveau
une apparition très remarquée du 16 décembre 1917 au 10 janvier 1918.
L’épisode débute par d’abondantes chutes de neige, notamment sur Paris
où il tombe 13cm. A partir du 24 décembre, le froid redouble d’intensité
et des températures sous souvent inférieures à -10°C. Le 29 décembre,
Perpignan est de nouveau ensevelie sous 40cm de neige. La matinée du 5
janvier 1918 est l’une des plus froide avec des pointes à -7°C à
Perpignan, -13°C à Paris (-14°C à St-Maur), -15°C à Clermont-Ferrand,
-16°C à Nancy et -17°C à Lyon.
Si généralement, la neige Parisienne se transforme rapidement en un
liquide jaunâtre, verdâtre, chimiquement décomposé par le sel, le
spectacle est cette fois-ci très différent : en raison de la guerre, les
saleurs sont rares et les rues restent complètement recouvertes d’une
neige parfaitement blanche durant quelques jours. Cette neige résiste
d’ailleurs jusqu’au 15 janvier 1918, soit durant 1 mois ! Peu à peu, la
boue remplace la neige et encore une fois (peut-être davantage que
d’habitude), les chutes de chevaux sont très nombreux, et l’on tente de
remédier à ce problème en attachant des morceaux de chiffons autour des
sabots. En raison d’un habillement complètement inadapté aux
circonstances (notamment les dames qui ont de longues robes), la marche
devient très problématique pour les citadins, et les incidents comiques
ne sont pas rares !
En lisant la presse de l’époque, on peut remarquer qu’en ces temps de
guerre où l’inconfort est partout, le froid et la neige sont vus d’un
mauvais œil, surtout dans les campagnes : « (…) pour qui, comme moi,
passait l’hiver aux champs, pour qui connaissait la tristesse poignante
répandue sur la nature entière, sur la vraie nature dés qu’il y gèle
fort ; pour qui avait vu, de ses yeux vu l’horrible neige arrêter tout
dans la campagne, y suspendre complètement la vie, y étouffer l’âme, et y
préparer ce fléau pire encore qu’est le dégel, pour le rural instruit
de ces désastres, l’exubérance heureuse de Charlotte (la citadine) à
propos de l’hiver semblait bien intempestive, en ces temps-là ! (…) » L’Excelsior - 9 février 1917. Un dessin paru dans Le Petit Journal du 4 février 1917 montre toutefois que les soldats organisent parfois des batailles de boules de neige sur le front. On s’occupe comme on peut !
Enfin, le journal l’Excelsior du mercredi 9 janvier 1918 consacre un
grand article sur « la rudesse anormale de deux hivers consécutifs ». Le
journal remarque que les habitants des campagnes et l’abbé Moreux
l’avaient « pronostiqué » grâce aux statistiques et aux observations de
la nature. Si la prévision météo pour la semaine n’apparaît jamais dans
les quotidiens, réaliser des tendances pour les mois à venir est une
pratique paradoxalement assez courante dans les campagnes.
Après ces terribles hivers de guerre, les années qui suivent ne sont généralement pas été aussi rigoureuses.
On peut citer les chutes de neige précoces du mois de novembre
1919 où le 14, il tombe 24cm à Paris et 25cm à Besançon. A ce propos,
les journaux de l’époque n’hésitent pas à évoquer le dérèglement des
saisons et la possible influence de la pollution liée aux canons de la
guerre… En aurait-on parlé autant si ces chutes de neige n’avaient pas
touché la capitale ? A Paris, des chenillettes Renault de la guerre
14-18 sont utilisées comme chasse-neige pour dégager les grandes
avenues.
Entre le 13 et le 20 janvier 1926, on assiste également à une
courte mais intense vague de froid qui fait suite à d’importantes
inondations. Du coup, on observe d’immenses étendues de glace. Face à ce
froid, une circulaire du ministre du Travail rappelle que les jeunes
gens de moins de dix-huit ans et les femmes ne devraient pas travailler à
l’extérieur quand le froid descend à 0 degrés. Tous les jours, la
presse dresse des listes des victimes de congestions avec le nom des
personnes, leur âge, leur profession et même leur adresse. Mais cette
vague de froid n’est vraiment rien à côté de ce qui va se produire au
cours du mois de février 1929…